07: Tavannes à Bienne

Dans un monde étroit de ponts routiers et de gorges le long de la Suze

 

DIDIER HEUMANN, ANDREAS PAPASAVVAS

Nous avons divisé l’itinéraire en plusieurs sections, pour faciliter la visibilité. Pour chaque tronçon, les cartes donnent l’itinéraire, les pentes trouvées sur l’itinéraire et l’état du GR65. Les itinéraires ont été conçus sur la plateforme “Wikilocs”. Aujourd’hui, il n’est plus nécessaire d’avoir des cartes détaillées dans votre poche ou votre sac. Si vous avez un téléphone mobile ou une tablette, vous pouvez facilement suivre l’itinéraire en direct.

Pour ce parcours, voici le lien:

https://fr.wikiloc.com/itineraires-randonnee/de-tavannes-a-bienne-vielleville-par-la-via-jura-34778921

Ce n’est évidemment pas le cas pour tous les pèlerins d’être à l’aise avec la lecture des GPS et des cheminements sur un portable, et il y a encore de nombreux endroits sans connexion Internet. De ce fait, vous pouvez trouver sur Amazon un livre qui traite de ce parcours.

 

 

 

 

 

Si vous ne voulez que consulter les logements de l’étape, allez directement au bas de la page.

Aujourd’hui, le parcours quitte les majestueuses montagnes du Jura pour descendre vers la plaine. Cette transition n’est pas sans défis, car la géographie de cette région est complexe et escarpée. Après avoir traversé un petit col et descendu vers Sonceboz, l’itinéraire emprunte une vallée qui s’enfonce abruptement, pour finalement plonger vers Bienne. La Suze, une rivière modeste, s’est frayée un chemin à travers les roches du Jura, formant des cascades tumultueuses et des gorges profondes, agrémentées de tourbillons, de falaises vertigineuses et de promontoires suspendus. Dans ce décor sauvage, les piliers de l’autoroute apparaissent comme des monstres gigantesques, aspirant l’eau de la petite rivière.

Une légende locale raconte que les gorges, connues sous le nom de gorges du Taubenloch, doivent leur nom à une jeune femme surnommée « Petite colombe » (« Taube » en allemand), qui s’y serait jetée après avoir été arrachée à ses noces par un brigand sanguinaire. Comme souvent dans les contes, la jeune fille est d’une beauté rare et le brigand, un monstre sanguinaire. En traversant ces gorges, vous serez sans doute émerveillé par la beauté et le mystère de ce paysage unique.

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Difficulté du parcours : Les dénivelés sont plus raisonnables que les jours précédents (+334 mètres/-644 mètres). C’est avant tout de la descente, après une montée un peu raide au col de Pierre-Pertuis. Puis, la descente est souvent calme, avec quelques petites bosses ou descentes marquées tout au long du parcours, notamment près de la Heutte et de Péry. Le chemin dans les gorges n’est ni périlleux, ni scabreux. Mais, ce n’est pas une étape de tout repos.

État de la Via Jura : Dans cette étape, les parcours sur le goudron et sur les chemins sont assez équivalents  :  

  • Goudron : 11.4 km
  • Chemins : 10.1 km

Parfois, pour des raisons de logistique ou de possibilités de logement, ces étapes mélangent des parcours opérés des jours différents, ayant passé plusieurs fois sur ces parcours. Dès lors, les ciels, la pluie, ou les saisons peuvent varier. Mais, généralement ce n’est pas le cas, et en fait cela ne change rien à la description du parcours.

Il est très difficile de spécifier avec certitude les pentes des itinéraires, quel que soit le système que vous utilisez.

Pour les vrais dénivelés, relisez la notice sur le kilométrage sur la page d’accueil.

Section1 : En passant par le col de Pierre Pertuis

Aperçu général des difficultés du parcours : pentes prononcées autant en montée qu’en descente, souvent à plus de 15%.   

 

Le périple d’aujourd’hui commence à la gare de Tavannes, une modeste gare qui, par sa simplicité, incarne le charme des petites villes suisses. Une route sinueuse longe d’abord la ligne de chemin de fer avant de la surplomber, offrant une vue panoramique sur le paysage environnant. 

Attention ici ! Bien que vous traversiez La Heutte, un autre parcours prend résolument la direction des montagnes. Ce n’est pas le vôtre. Votre itinéraire vous mènera au Col de Pierre Pertuis, un col de prestige, avant de redescendre vers Sonceboz, suivant la trace historique de la Via Jura 80.

La Via Jura quitte discrètement la périphérie de Tavannes, serpentant sur un bitume lisse qui surplombe les voies ferrées. En un clin d’œil, vous êtes projeté hors de la cité, dans un monde où la nature règne en maître.
Ensuite, elle s’engage sur un petit chemin de campagne, vous guidant vers les tunnels mystérieux de l’autoroute.
Rapidement, elle retrouve le chemin de fer et passe sous l’une des bretelles de l’autoroute transjurane A16, une artère vitale souvent dissimulée sous terre. Il faut bien comprendre que la géographie ici est complexe. Autrefois, tout le trafic transitait par le Col de Pierre Pertuis, entraînant souvent des embouteillages dans le vallon étroit. Aujourd’hui, l’autoroute a considérablement simplifié la circulation dans la région. Le col est désormais délaissé, laissant place à une route plus fluide. Cependant, il est crucial de considérer l’insertion de l’autoroute et de la bretelle menant à Tavannes dans ce contexte.
La Birse, rivière que vous remontez depuis Bâle, trouve ici sa source. C’est au cœur de la montagne de Pierre Pertuis qu’elle naît, confinée dans un édifice fermé à clé, comme pour préserver son mystère ou sa pureté originelle. Elle n’est pas au cœur d’une nature grandiloquente, juste en dessous d’un viaduc routier. En grosses lettres bleues est inscrit sur une vitrine : source de la Birse. Une volée d’escaliers y mène, mais l’endroit, qui s’apparente à un petit bunker, est fermé. Rien de très spectaculaire à l’intérieur, si ce n’est une ouverture dans une paroi rocheuse où l’eau sort du flanc nord de Pierre-Pertuis. Ces eaux sont d’origine karstique, provenant d’une circulation d’eau souterraine dans les roches calcaires. Si la source est fermée, c’est sans doute parce qu’elle alimente en boisson la population de Tavannes.  
Derrière la source de la Birse, un mauvais petit chemin dans la terre glaise, suivi d’un petit escalier abrupt vous conduisent juste au-dessus vers une route goudronnée, serpentant en direction du col.

Les récits des voyageurs célèbres qui ont franchi ce col abondent ici, remontant à l’époque des diligences, lorsque ce passage était incontournable pour traverser du Jura au plateau suisse. Ce col est mentionné dans la Grande Encyclopédie de Diderot, et Goethe lui-même a emprunté cette voie.

Peu au-dessus, magistrale, se dresse le la roche percée de Pierre Pertuis (petra pertusa). Un pertuis, issu du bas latin « pertus », désigne un détroit entre deux îles ou un passage étroit, comme un col de montagne ou une gorge. En France, près de Vézelay, on trouve le village de Pierre-Perthuis (Roche percée) près de la rivière La Cure.

Les promoteurs locaux aiment à rappeler le prestige de cette roche. En revanche, ils ne se prononcent guère sur l’inscription latine gravée au fronton du passage. Et pour cause. Ici, c’est un passage naturel, élargi dès l’époque romaine pour la voie reliant Aventicum (Avenches) à Augusta Raurica (Bâle). Une inscription gravée dans la roche au-dessus du pertuis témoigne de cet agrandissement au IIIe siècle après J.C. Elle déclare : « En l’honneur des Empereurs, cette route a été tracée par Marcus Dunius Paternus, Duovir (co-gouverneur) de la colonie des Helvètes ». Historiquement, cette inscription, gravée sur les ordres du magistrat d’Avenches Paternus, confirme que c’est à l’époque romaine que fut aménagée la route du col. Le trou naturel dans la roche a été agrandi alors pour permettre le passage. Une tradition née à la fin du Moyen Âge et sans lien avec l’inscription fait de Jules César le créateur de cette voie antique. Partout, on aime les grandes histoires et les héros célèbres. Mais Jules César n’a jamais passé par ici. On le saurait. Ce passage a été utilisé jusqu’au début du XXe siècle, avant que la route du col, accessible aux voitures, ne soit construite. Cependant, la majorité des voyageurs ne passent plus par ce col routier depuis l’ouverture de l’autoroute en 1997. Ici, vous êtes à 10 minutes du col proprement dit.

Dès la sortie du pertuis, la petite route serpente prestement vers les hauteurs du col, muant rapidement en un chemin de terre. La progression est rapide et inattendue, semblable à une promesse tenue à demi-mot, celle d’un col qui ne se dévoile que subtilement.
Dès que le chemin rejoint la route du col, un sentier verdoyant émerge alors, s’étirant le long de la route du col, comme un fil conducteur qui guide le voyageur vers les hauteurs. Ici, le vallon est encaissé, et la lumière ne pénètre guère. Vous aurez parfois le sentiment de marcher à l’aube. 
Plus haut, un chemin escarpé se dresse, défiant les marcheurs avec sa pente raide. Il s’élève quelques centaines de mètres au-dessus du col sans toutefois faire mine d’y aller. Le col lui-même, avec ses 826 mètres d’altitude, vous vous conterez de l’observer de haut. Étonnamment, la montée du col par la route reste douce, presque accueillante, une rareté pour une telle ascension. Ici, à 855 mètres, vous ne vous trouvez guère plus haut que le col, suivant la Via Jura, à 50 minutes de Sonceboz.
Le chemin, toujours fidèlement la Via Jura 80, redescend en serpentant sur une modeste route, puis sur un chemin étroit parmi les imposants épicéas et les érables graciles. La barrière calcaire des falaises devant vous parle de la tortuosité de la nature en ces lieux.
Plus bas, un sentier herbeux se fraie un passage discret pour rejoindre la route qui descend du col vers Sonceboz.
La Via Jura abandonne alors la route du col à son sort, et s’engage pour une longue descente sur la terre battue dans la forêt vers Sonceboz. Ici, les feuillus, maîtres des lieux, relèguent progressivement les épicéas au second plan.
Plus bas, le chemin semble se perdre dans une nature foisonnante, traversant un enchevêtrement de rejets de hêtres, d’aulnes et de petits érables champêtres, créant une atmosphère presque enchantée.
Puis, la terre battue revient de manière plus organisée. La descente est assez régulière, mais parfois assez sévère, avec des pentes de plus de 15%.  On descend tout de même de 200 mètres sur 2 kilomètres.  Quand la lumière manque, le paysage est plutôt terne. Alors voici quelques images d’automne dans la lumière rasante.
Plus bas, la forêt s’éclaircit et le chemin arrive sur un grand giratoire à l’entrée de Sonceboz, dans un quartier industriel et de services.
Dans ce grand giratoire passent la route du col, l’autoroute qui s’engouffre dans un tunnel et le chemin de fer. La Via Jura traverse alors le carrefour pour se diriger vers la gare.

Section 2 : Un premier tronçon le long de la Suze

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans problème.   

 

Ici, le passage de l’autre côté de la vallée se révèle délicat. Entre le rocher imposant, la rivière tumultueuse, le train en mouvement, la route sinueuse et l’autoroute vrombissante, il est évident que le chemin direct n’est pas une option. Un détour à travers Sonceboz s’impose. Vous empruntez d’abord la route de la gare, vous orientant vers la rivière avec prudence. 

La route franchit la Suze, une rivière dont la source se trouve plus en amont dans le Jura, précisément dans le vallon de St Imier. Cette rivière sera votre compagne jusqu’à Bienne. La route continue alors vers la gare de Sonceboz-Sombeval, rappelant qu’en réalité, deux villages coexistent ici.

Mais l’illusion de simplicité est de courte durée. Il faut rester vigilant, car la route ne mène pas directement à la gare. La complexité géographique des lieux impose un parcours sinueux.

La route passe sous le pont ferroviaire, émergeant de l’autre côté par une route justement nommée la Rue de l’Envers. Ici, le train imite le marcheur : après avoir émergé de sous la montagne de Pierre Pertuis, il décrit une grande boucle avant de suivre de nouveau la Suze. Toutes les petites villes du Jura bernois possèdent une gare reliée à Bienne, une veine d’acier et de béton traversant les monts.

À l’extrémité de la Rue de l’Envers, la Via Jura abandonne Sonceboz pour s’orienter vers la Métairie de Nidau. Cette étape nécessite de jongler avec une vallée étroite et encaissée, un défi constant entre nature et civilisation. 

La ligne de chemin de fer traverse la Suze d’un bond élégant, tandis que la Via Jura s’engage sur un sentier étroit, longeant la rivière à travers un petit sous-bois intime et ombragé.

La végétation y est dense, foisonnante, envahissant les abords de la voie ferrée et de la rivière avec ses rejets de hêtres, ses aulnes robustes, sa charmille et ses buissons enchevêtrés.

Le chemin se rapproche alors de la rivière, offrant des vues dignes de tableaux pastel ou de cartes postales, où chaque élément semble être à sa place, dans une harmonie naturelle. 

La rivière, paisible à l’approche d’un petit bassin de rétention, dévoile ensuite rapidement son caractère fougueux et cascadeur, renouant avec sa nature dynamique.  

Plus bas, le chemin s’insinue sous les piles imposantes de l’autoroute. Cette proximité constante avec l’autoroute, bien que surprenante, crée un contraste frappant. Ce n’est pas une laideur, mais une sorte de gigantisme industriel inséré dans une nature tourmentée, où l’autoroute alterne entre viaducs et tunnels.

Un peu plus loin, le chemin atteint une barrière, marquant l’accès à une station d’épuration (STEP). 

On y entend des promesses fantaisistes : dans un siècle, une piscine municipale avec des toboggans géants permettra de se baigner dans les eaux de la STEP. Une vision évidemment ironique mais amusante.  

Une route goudronnée prend ensuite le relais, suivant la rivière le long de la voie d’accès à la station d’épuration, un jeu complexe de piles d’autoroute et de barrières.

L’autoroute disparaît à nouveau dans un tunnel de l’autre côté de la rivière, tandis que votre parcours, parfaitement balisé, s’oriente vers la métairie de Nidau.

Section 3 : Par vaux et par monts dans la forêt

Aperçu général des difficultés du parcours : quelques pentes sévères, surtout pour descendre sur la Heutte, à nettement plus de 15%.    

 

La route s’élève paisiblement le long d’un mur de pierres sèches, serpentant à travers les prés en direction de la métairie qui trône juste au-dessus. 

Niché dans le vaste domaine de Nidau, cet endroit ne se contente pas d’être une simple métairie ; il se transforme en un refuge gastronomique qui invite les voyageurs à s’attarder et à savourer l’essence de la campagne environnante.

Un chemin de terre s’éloigne de la métairie de Nidau, abandonnant derrière lui les murs de pierre, pour s’enfoncer résolument dans le mystère de la forêt.

Ici, dans ces bois qui résonnent de l’écho ancestral, l’histoire ancienne prend vie : des empreintes fossilisées de dinosaures témoignent d’une époque révolue, rappelant à l’homme sa fugacité face à la lente marche du temps.

Le large chemin monte avec une insistance mesurée sur près d’un kilomètre, alternant entre des sections de légère inclinaison et des pentes plus abruptes, plongeant ainsi au cœur de la majestueuse forêt de l’Envers. Ici, les hêtres déploient leurs feuilles comme des fresques d’or et de vert, les érables projettent leur ombre protectrice, tandis que les épicéas offrent leur parfum boisé à la brise qui caresse les cimes. 

Au détour du chemin, au lieudit de la Forêt de l’Envers, la Via Jura prend la décision de renoncer à la quête des dinosaures. C’est ici que l’exploration s’ouvre sur un autre aspect de la nature, moins ancien mais tout aussi captivant, du moins dans sa rudesse et sa sauvagerie.

Un chemin dévale abruptement à travers la forêt en direction de La Heutte, sa descente sèche forçant le randonneur à zigzaguer entre les buissons et les herbes folles qui bordent le sentier. C’est au départ que la pente est la plus vertigineuse, une descente qui défie l’équilibre et engage chaque pas avec précaution. 

Plus bas, le chemin s’ouvre, sa largeur s’élargit tandis que la pente se fait plus clémente, invitant un soupir de soulagement aux marcheurs qui poursuivent leur route vers La Heutte.

Bientôt, les premières habitations du village émergent à l’horizon, le chemin serpentant vers le bas pour franchir la rivière qui traverse ce paisible hameau. 

Quelques pas plus loin, une route pavée trace son chemin devant la gare, traversant La Heutte avant de grimper à nouveau au-delà du village.  

La montée est soutenue, grimpant vaillamment jusqu’à atteindre l’école nichée au bord de la forêt. Les bambins ici n’ont pas besoin de séances de gymnastique ; leur énergie débordante les transforme en petits volcans en éruption, sculptant leurs muscles comme des artistes façonneraient de l’argile. 

Plus loin, un large chemin se profile, montant de manière progressive à travers une forêt où les majestueux hêtres s’élèvent comme des titans. Leur présence imposante et leur stature altière captivent l’œil, offrant un spectacle de beauté naturelle inégalée lorsque leurs silhouettes se dressent fièrement, loin des modestes repousses touffues qui peuplent parfois le sous-bois. 

Section 4 : Dans le goulet de la Suze

Aperçu général des difficultés du parcours : quelques pentes sévères, en descendant vers Péry, mais sans difficulté.  

Le chemin serpente obstinément à travers les frondaisons touffues, grimpant avec une inclination prononcée. Sous la canopée majestueuse des hêtres géants, une fraîcheur bienvenue enveloppe le marcheur, rafraîchissant chaque pas dans cette montée vigoureuse. Ne vous laissez pas tromper par l’apparente douceur du Jura, même s’il fait partie des Préalpes ; il ne se limite pas à des sentiers tranquilles. Les chemins peuvent révéler des défis dignes des plus intrépides aventuriers. 

À mesure qu’il s’élève, le chemin dévoile les gracieuses chutes du Pichoux, leurs eaux captivées dans une sérénité émeraude, un joyau caché dans l’écrin de la nature. L’eau qui cascade descend avec une grâce voluptueuse, offrant une fraîcheur enivrante qui réveille les sens. 

De là, un sentier étroit dévale brièvement à travers la forêt dense, s’époussetant des feuilles automnales, jusqu’à ce qu’il émerge aux premières lueurs des habitations de Péry-La Heutte. 

En contrebas, la gorge profonde où la Suze s’engouffre se dévoile, une cicatrice vertigineuse dans le paysage boisé.  

Descendant encore, de modestes escaliers s’enfoncent avec détermination vers le cœur du village, leurs marches usées par les siècles d’usages et de rêveries. 

La route ensuite déroule son ruban dans toute sa longueur à travers le village, une artère vivante qui raconte l’histoire d’une communauté nichée entre les montagnes, les rivières et le vallon encaissé. 

Elle se déploie ensuite en descente vers la gare de Reuchenette-Péry, un carrefour où se croisent la rivière murmureuse, la RN6 animée, et l’autoroute qui s’engouffre en un soupir discret sous la terre, un mélange si complexe qu’il vous plonge dans un flou mystérieux, laissant chacun chercher sa propre place dans ce tableau énigmatique. 

Ici, dans ce paysage où la nature et la civilisation entrelacent leurs destinées, chaque étape est une symphonie de contrastes et d’harmonie, tissée par le passage des saisons et l’écho des histoires anciennes. 

Ici, la topographie devient un labyrinthe complexe dans une vallée resserrée, où se dresse imposante une gigantesque cimenterie, exploitant les richesses locales de marnes et de calcaires, obstruant l’horizon de ses structures massives. C’est d’une beauté brute, mais d’une utilité indéniable, comme un outil rustique qui, bien que peu séduisant, accomplit sa tâche avec une efficacité redoutable. 

La Via Jura descend le long de la route nationale, se faufilant comme une ligne de vie à travers ce paysage industriel. Pour franchir l’obstacle, elle s’engage dans un passage souterrain sous la route nationale, s’intégrant brièvement au cœur de l’usine elle-même. 

À la sortie de cet univers industriel, la Via Jura suit les voies d’accès, son chemin tracé dans le sillage de l’activité industrielle. 

Émergeant du site, elle longe un moment la RN6 le long des rives tranquilles de la Suze, avant de bifurquer en direction de Rondchâtel. 

Elle passe sous la route nationale, celle-ci se faufilant dans un tunnel, où le ballet incessant de la route, du train et de l’autoroute se déroule comme une chorégraphie complexe, la Via Jura cherchant sa place dans ce tableau mouvant. 

Plus bas, l’agitation se dissipe, laissant place à la quiétude alors que la route s’achemine sereinement vers Rondchâtel. Dans ce périple jalonné d’obstacles et de transformations, la Via Jura incarne à la fois la résilience face à l’industrialisation et la beauté qui perdure malgré les défis du progrès. 

Section 5 : Dans les gorges de Taubenloch

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours en descente avec des pentes raisonnables.   

À Rondchâtel, l’odyssée sur la Via Jura débute de l’autre côté de la Suze, ses eaux grondantes comme un poème tumultueux dans les confins du Jura bernois. 

Loin des descriptions souvent enjolivées, la réalité se révèle : la route s’approche d’une décharge, contournant habilement l’autoroute par un détour astucieux. Les contours géographiques sont ici d’une complexité déconcertante, chaque détour révélant une nouvelle facette du paysage. 

De là, un petit chemin longe l’autoroute pour repasser sous l’autoroute un peu plus bas. La géographie des lieux est décidément complexe ici. Pas d’impatience, l’autoroute, on la retrouvera plus bas.  

Sitôt l’autoroute à nouveau franchie, un petit chemin repart dans les taillis de feuillus pour retrouver un plus large chemin en dessous. Le grondement continu de l’autoroute accompagne la marche, rappelant qu’elle sera retrouvée plus bas. 

Puis, une fois encore, la Suze est franchie, réapparaissant dans toute sa splendeur tourbillonnante, après avoir été abandonnée à Rondchâtel. Tout le parcours vers Bienne n’est qu’un dialogue continu avec la rivière, qui cascade avec grâce dans le vallon encaissé et profond, murmurant ses secrets au fil de son parcours. 

Le chemin se transforme alors en une route de terre descendant sous les falaises, se faufilant parmi les arbres feuillus jusqu’à Frinvillier. Le sous-bois ici s’éloigne des standards d’élégance, offrant une beauté sauvage et authentique, où le désordre de la nature s’épanouit en une harmonie rustique. 

À l’entrée du village, une rétention d’eau tranquille miroite sous le soleil, tandis que les ponts qui traversent la rivière sont autant de symboles de l’ingéniosité humaine : chemin de fer, route, et autoroute s’étirent en un ballet métallique et asphalte, unissant le paysage de manière presque poétique. 

Frinvillier, ultime bastion du Jura bernois, révèle un changement subtil mais tangible : l’allemand reprend ses droits, même si Bienne prétend au titre de ville bilingue. C’est ici que les indications fourmillent, pointant dans toutes les directions, mais la nôtre reste fidèle : Bienne-Bözingen, sur la Via Jura 80. À moins d’une heure de marche de Bienne, le voyage promet encore bien des découvertes, entre langue germanique et majesté naturelle. 

La Via Jura traverse la première partie du village, descendant ensuite vers la rivière. 

Un sentier délicat suit le canal surélevé de la Suze, s’enfonçant sous le village. L’endroit regorge véritablement de grâce et de charme. 

Pourtant, la Suze persiste sous les frondaisons, désormais baptisée Schüss. À ce stade, la connaissance de l’allemand devient cruciale, car le parcours se déploiera principalement dans la partie germanophone du pays lors des prochaines étapes.

D’ici, l’itinéraire se dirige vers les gorges du Taubenloch. La société d’exploitation des gorges a aménagé en 1889 un sentier de randonnée remarquable pour traverser à pied ces gorges sculptées par la Suze jusqu’à Bözingen (Boujean en français). 

La Via Jura pénètre ensuite dans la forêt qui longe le canal. Ici, les arpenteurs ont dansé avec la rivière, l’orientant par moments tout en lui laissant d’autres sections vagabonder librement, pour le plaisir des yeux et des commodités locales. 

Un premier ouvrage hydraulique se dévoile lorsque le canal retrouve le lit de la rivière. 

Plus on s’enfonce dans la gorge du Taubenloch, plus le ravissement s’intensifie. La rivière a patiemment façonné son chemin à travers la barre rocheuse, créant des tourbillons agités, des grottes mystérieuses, des falaises abruptes et des éperons saisissants. 

Au-dessus, les arches imposantes des viaducs autoroutiers effleurent le ciel, encadrées par les majestueuses futaies de hêtres qui persistent à chaque tournant du chemin. 

Par endroits, le vallon se rétrécit tellement que le chemin a dû être taillé à même la roche. Les fluctuations du niveau d’eau sont visibles, comme en témoigne une ancienne jauge datant de 1910. 

Tout au long de la descente, une série de ponts permet au promeneur de naviguer d’une rive à l’autre de la rivière tumultueuse, dévalant entre les rochers couverts de mousse dans cette atmosphère souvent humide. Le jeu qui consiste à passer d’un pont à l’autre, d’une barre rocheuse à l’autre, devient un véritable ballet avec la nature, une danse suspendue qui coupe le souffle. C’est comme si le chemin lui-même se faisait complice, invitant à un enchaînement de mouvements aériens entre ciel et terre, chaque pas révélant un nouveau miracle. Les gouffres s’ouvrent sous les pieds, les ponts frémissent au gré du vent, et le cœur s’emballe, emporté dans un tourbillon d’éléments. Une aventure qui dessine un sourire sur les lèvres et remplit l’âme d’émerveillement. 

À mi-parcours, le chemin passe à proximité d’un des bâtiments de l’ESB. La centrale hydroélectrique du Taubenloch, mise en service dès 1896, est un témoignage vivant de l’ingéniosité humaine. La société Brown, Boveri & Cie fut chargée de sa réalisation, inaugurant ainsi le service électrique de Boujean. Lors de la fusion des communes de Bienne et de Boujean en 1917, la centrale devint propriété du Service électrique de Bienne, subissant par la suite des transformations et modernisations en 1941/42. Encore aujourd’hui, elle contribue significativement à l’approvisionnement électrique de Bienne. 

Par moments, une modeste retenue d’eau interrompt le cours de la Suze. Le lit de la rivière est jonché de gros blocs calcaires affleurant ici et là, parfois submergés lorsque les eaux montent. Et toujours omniprésents, les tentacules autoroutiers s’étirent comme un ciel menaçant. 

En français, ce complexe hydraulique est connu sous le nom de Boujean. En allemand, il se nomme Bözingen. 

Le chemin serpente toujours sous les impressionnantes parois rocheuses, traversant d’une rive à l’autre sous les monstrueuses arches de l’autoroute. L’ambiance devient presque fantasmagorique, pourrait-on dire ainsi. 

Section 6 : Bienne Altstadt mérite une visite

Aperçu général des difficultés du parcours : un peu raide à la sortie des gorges, puis la ville.   

Dans le bas des gorges, le chemin flâne parfois le long des rochers, toujours en harmonie avec la rivière qui chante doucement sur les pierres. À aucun moment du parcours, il n’y a de signe de danger. 

Vous approchez progressivement de la fin des gorges. Les deux ponts imposants de l’autoroute barrent le ciel au-dessus de vous, comme deux géants de béton tendus entre les falaises. Leurs arches, puissantes et rigides, semblent suspendues dans l’air, défiant le vide en une prouesse d’ingénierie, tandis que leur ombre s’étire en dessous, enveloppant la vallée d’un voile d’ombre et de mystère. C’est un spectacle qui rappelle la force tranquille des montagnes, un contraste fascinant entre la nature indomptable et les mains de l’homme, suspendues en équilibre au-dessus du monde.

Ce fut une balade de bonheur durant 40 minutes depuis Frinvillier. Bözingen n’est plus qu’à 10 minutes d’ici. 

Au fond des gorges, la Via Jura 80 atteint son point culminant. Les parois de la gorge se resserrent, encadrant le sentier d’une étreinte presque intimidante, jusqu’à forcer le chemin à s’engouffrer dans un tunnel sombre. Ce passage, sculpté dans la roche, semble une porte secrète menant vers l’ancienne usine de Boujean, telle une enclave industrielle dissimulée dans le cœur sauvage de la montagne. La lumière change, le bruissement de l’eau s’amplifie, et l’atmosphère devient à la fois solennelle et fascinante. Les bâtiments industriels anciens et nouveaux témoignent de l’activité économique nourrie par la proximité de la rivière. 

Le parcours émerge alors des gorges. Comme dans tout bon spectacle, on applaudit à tout rompre. 

La Via Jura 80 s’achève à Bözingen, où la Suze traverse la nouvelle ville avant de se jeter dans le lac de Bienne. Pour ceux qui souhaitent continuer leur chemin vers Genève et rejoindre le Chemin de Compostelle, il suffit de suivre la direction de Vingelz. Cependant, Bienne mérite une visite prolongée. Et lorsque l’on chemine, trouver un logement pour la nuit est souvent une bonne idée. 

Il suffit de suivre la Rue de Boujean, la Bözingenstrasse, pour arriver au centre-ville. Rien de bien surprenant sur cet axe principal, mais il est également possible de prendre le bus. En un peu plus d’un kilomètre droit devant, vous attendrez le cœur de la ville où se déploie la magnifique Altstadt, la vieille ville de Bienne. Cependant, avant d’y arriver, vos yeux pourraient être attirés par les hauteurs de la ville où brille un joyau helvétique assez célèbre. Mais à Bienne, ce n’est pas seulement Rolex qui fait la renommée, car Swatch, Omega et Tissot ont également élu domicile ici. 

Avec plus de 55’000 habitants, Bienne s’anime près de la place du marché. Sur la gauche, les artères commerçantes du centre-ville descendent vers la gare. 

Mais la partie la plus captivante de la ville se trouve sur votre droite : l’Altstadt, avec ses belles demeures, ses rues pavées et ses places ornées de statues dédiées au canton de Berne. 

L’église St Benoît, près de l’hôtel de ville, est à l’origine un édifice roman du XIIIe siècle. Bien qu’elle ait été reconstruite dans un style gothique au XVe siècle, elle reste aujourd’hui un lieu de culte réformé marquant de son empreinte l’histoire de la ville. 

Logements sur la Via Jura

Hôtel Restaurant du Cerf, 4 Rue du Collège, Sonceboz ; 032 488 32 22 ; Hôtel***, repas, petit déj.
• Hôtel La Truite, 3 Reuchenette, Péry ; 032 485 14 10 ; Hôtel***, repas, petit déj.
• Auberge des Gorges, Taubenlochweg 5, Frinwilier ; 032 358 11 75 ; Hôtel**, repas, petit déj.
• Christiane Jordan, 44 Faubourg du Lac, Bienne ; 032 322 29 04 ; Chambre d’hôte, petit déj.

Le Jura demeure une destination prisée avant tout par les touristes locaux. En conséquence, les hébergements se font plus discrets, à l’exception des Airbnb, pour lesquels nous ne disposons pas des adresses. Dans cette étape, vous pouvez vous loger avant d’arriver à Bienne, une grande ville avec tous les commerces. Pour les autres logements de Bienne, consultez l’Office du Tourisme (032 329 84 84).

N’hésitez pas à ajouter des commentaires. C’est souvent ainsi que l’on monte dans la hiérarchie de Google, et que de plus nombreux pèlerins auront accès au site.
Etape suivante : Etape 8: De Bienne au Landeron
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