Etape 09a: Visite de Lucerne

Une petite visite de Lucerne

 

Si vous accostez ici un jour de pluie, l’image qui se dévoile à vos yeux est d’une mélancolie presque palpable. On dirait que vous débarquez dans une ville en second plan, avec en guise de décor un vaste hangar sur votre gauche et quelques clochers qui émergent des toits. Mais ne soyons pas avares de compliments. Lucerne est une cité d’une beauté exquise. Par temps clair, elle se métamorphose totalement.

L’avantage de découvrir une cité très touristique par temps de pluie est indéniable. Il est bien plus facile de traverser une ville où les touristes ont considérablement prolongé leur petit déjeuner, avant de se précipiter vers les montres et les couteaux. Sous la pluie, au port, il n’y a pas foule. Les parapluies et les imperméables sont de sortie. Mais aujourd’hui, nous visiterons la ville par un temps magnifique.

Pour vous orienter, voici un plan de la ville (https://www.orangesmile.com/common/img_city_maps/lucerne-map-0.jpg).

Débutons notre exploration sur la Place de la Gare (Bahnhof Platz). 

À proximité du port, se trouve la gare de Lucerne, en cul-de-sac. La première gare ferroviaire de Lucerne a vu le jour à la fin du XIXe siècle. Sa proximité avec le lac, son emplacement privilégié au cœur de la ville ont contribué à son succès, de même que le début de l’exploitation des bateaux à vapeur sur le lac. Elle est devenue un nœud ferroviaire important, avec des départs pour le Gothard, et également pour l’Oberland bernois, attirant une foule d’asiatiques, d’indiens ou d’arabes, se déplaçant en masse vers Interlaken à bord du train à voie unique qui passe par le Brunig.
La gare a connu un grave incendie en 1971. On a érigé une gare provisoire et un projet de nouvelle gare a vu le jour. La nouvelle gare a été conçue par Santiago Calatrava Valls, un architecte espagnol qui a dessiné de nombreux ponts et gares. Mais la gare n’est pas qu’un simple lieu de transit. C’est également un immense complexe commercial.
C’est également ici, à proximité de la gare, près des quais d’embarquement des bateaux, que le grand architecte Jean Nouvel a signé en 1998 le prestigieux KKL, qui de loin ressemble à un imposant hangar de métal. Il s’agit du palais de la culture et des congrès (Kultur- und Kongresszentrum Luzern, abrégé KKL), un édifice qui a coûté la bagatelle de 226 millions de francs suisses. L’architecte a intégré l’eau à l’architecture, n’ayant pas la possibilité de construire le bâtiment sur l’eau, comme il l’aurait souhaité. L’eau est omniprésente, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur.
Le bâtiment abrite une salle de concert, une salle multifonctionnelle, le musée d’art de Lucerne, ainsi que d’autres espaces dédiés aux conférences et aux congrès, sans oublier les restaurants.
La salle de concert, pouvant accueillir jusqu’à 1900 spectateurs assis, est renommée pour sa qualité acoustique exceptionnelle. Elle accueille une grande variété de genres musicaux, mais reste surtout dédiée à la musique classique. Le Festival de Lucerne, organisé depuis 1938 en août et septembre, est désormais un événement majeur de la musique symphonique, proposant plus de 30 concerts avec les plus prestigieux orchestres du monde. Depuis 1999, le festival d’été choisit un thème spécifique. En réalité, il faut parler au pluriel des festivals, car deux autres rendez-vous rythment l’année : le festival de Pâques, axé sur la musique baroque, et le festival de piano en novembre.
Le Musée des Beaux-Arts de Lucerne, situé au dernier étage du KKL, présente des expositions temporaires couvrant divers courants de l’art contemporain ainsi que des collections dédiées à l’art suisse, de la Renaissance à nos jours. Certains préféreront peut-être le musée Picasso, qui a une particularité remarquable : il n’y a aucune peinture du maître. Les visiteurs y trouveront des lithographies, des gravures, des céramiques et des portraits. Sans oublier bien sûr le musée des transports, situé à l’entrée de la ville, de l’autre côté du lac.

Devant le KKL, un portique modeste et incertain accueille les visiteurs à Lucerne. 

Remontons désormais la Reuss pour découvrir les deux magnifiques ponts de bois de Lucerne. 

Si les montres captivent les touristes asiatiques, Lucerne possède un trésor inestimable qui attire des visiteurs du monde entier : le plus vieux pont couvert en bois d’Europe, plus photographié encore que le Cervin. Il s’agit du célèbre Pont de la Chapelle (Kappelbrücke), érigé en 1333, il y a près de 700 ans, pour relier les deux rives de la ville en enjambant la Reuss. Autrefois plus long, une partie du pont a été emportée par les crues, ne laissant que ses 204 mètres actuels.
Au milieu du pont se dresse le Wasserturm (Tour de l’Eau), érigé au début du XIVe siècle. Cette tour octogonale de 34 mètres de haut servait autrefois de prison et abritait les archives de la ville. Aujourd’hui, elle abrite les quartiers généraux de l’Association de l’artillerie lucernoise.
L’atmosphère sur le pont dépend de l’heure de la journée. Pour profiter de la tranquillité, mieux vaut venir avant l’afflux des touristes.
Par temps de pluie, l’ambiance sur le pont est moins envoûtante, mais cela n’empêche pas les visiteurs d’affluer. Parfois, il y a même des embouteillages. Entre deux boutiques de souvenirs, les visiteurs asiatiques se pressent également pour une photo de groupe.
Des panneaux triangulaires du XVIIe siècle, peints à l’huile, sont présents sous la charpente du pont. Ces tableaux, à la gloire de l’importance de la ville, retracent les principaux événements de l’histoire suisse. On sait qu’il devait en exister 150 unités. Hélas, dans la nuit du 17 au 18 août 1993, le pont eut très chaud. Un violent incendie, d’origine inconnue, ravagea l’édifice de bois, qui s’embrasa immédiatement, ne laissant intactes que les deux extrémités du pont. Une grande catastrophe, bien évidemment. En 8 mois, un pont fut reconstruit à l’identique, ou presque. Quant aux tableaux, un certain nombre d’entre eux ont pu être restitués d’après des illustrations anciennes. Mais, la plupart sont partis en cendres, comme le témoignent les places laissées vides sous la charpente.
Au bout du Kappelbrücke, sur cette même rive de la rivière, on trouve l’ancienne église des Jésuites, une des grandes églises baroques de Suisse. Datant du XVIIe siècle, elle est consacrée à St François-Xavier, missionnaire de la compagnie de Jésus. Faisant partie d’un complexe qui formait le Collège des Jésuites, elle a subi depuis quelques amendements.
En remontant la Reuss, il y a des passerelles métalliques qui permettent de traverser la rivière. Là-haut sur la colline se dresse le Château de Gütsch.
De la deuxième passerelle métallique, vous vous trouvez en face du Spreuerbrücke.
Lucerne possède un autre pont de bois célèbre : “Le Pont de la Danse des Morts” (Spreuerbrücke). Ce dernier, également en bois, est tout aussi beau que le Kappelbrücke, quoiqu’un peu plus sombre. Ici, le pont n’a pas pris feu. Il date de 1408, sa fonction étant de protéger la ville contre les invasions. Le pont tire son nom du mot allemand Spreu qui signifie ivraie. C’était ici l’endroit depuis lequel on pouvait jeter les pailles de céréales et les feuilles mortes dans la rivière. Le peintre lucernois Kaspar Meglinger y a peint, au XVIIe siècle, 67 tableaux sur le thème de la danse macabre.
Du pont, vous avez de belles perspectives de la rivière vers l’église des Jésuites.
La majorité des touristes ne va pas plus loin que le Speuerbrücke. Mais si vous continuez à remonter la Reuss, vous pouvez monter au Château de Gütsch, à pied ou par le funiculaire. En 1859, Burkhard Pfyffer acheta à la ville un terrain sur la colline de Gütsch et obtint le droit de gérer une auberge. L’auberge fut ensuite agrandie en hôtel. Le Château fut construit en 1884 spécifiquement pour soutenir l’hôtel. De nombreuses têtes couronnées ont séjourné ici. Une grande partie de l’hôtel fut détruite par un incendie et en 1901, l’hôtel reçut son apparence actuelle, s’inspirant de l’illustre Château de Neuschwanstein en Bavière. Il passa plus tard sous propriété russe, appartenant actuellement à Kiril Androsov, ancien manager d’Aeroflot. Le Château Gütsch domine fièrement Lucerne. Mais maintenant, des nuages sombres s’amoncellent, car son propriétaire pourrait être proche de Poutine. Cependant, il ne figure actuellement sur aucune liste de sanctions. Il se considère comme un prêteur de capital-risque.
Voici encore un lieu de Lucerne où vous ne rencontrerez guère les touristes. Il n’y a pas de montres à vendre par là. Ce sont les remparts de la Musegg et ses 9 tours, l’ancienne fortification de la ville. Ce site se trouve juste en face du Spreuerbrücke, sur l’autre berge.
Lucerne est dans le top 50 des villes les plus visitées du monde, avec plus de 1 million de nuitées répertoriées. C’est la destination touristique la plus performante de l’Arc alpin. Dans les classements spécifiques pour l’été, Lucerne est en tête, juste devant Interlaken, tandis que Weggis occupe la 6ème place. Salzbourg n’est que 3ème du classement, mais l’Autriche domine tous les podiums en hiver, et de loin ! À Lucerne, les touristes asiatiques, en particulier les Chinois avant le COVID, arpentent la ville aujourd’hui. Ils viennent visiter un petit pays au cœur de l’Europe, un peu comme l’ont fait en leur temps les Britanniques, pionniers du tourisme. Mais pour eux, ce n’est pas pour le fromage et l’air pur qu’ils sont ici. Leur intérêt se porte sur les montres, les couteaux et la joaillerie. En fait, ce sont les Japonais qui ont débarqué les premiers, surtout en groupes, pour visiter Lucerne et monter dans le Lucerne-Interlaken Express afin de se rendre à Interlaken et de purifier leur âme sur le Jungfraujoch. Ces touristes asiatiques affectionnaient les séjours dans les hôtels de luxe et privilégiaient les produits de marque. Aujourd’hui, le marché japonais stagne, laissant place aux Chinois. Mais on voit émerger les Coréens, les Indiens et surtout les Arabes du Golfe. Une partie de cette horde de touristes part sur le Lucerne-Oberland Express pour Interlaken. À Interlaken, certains hôtels ont des tapis de prière tournés vers la Mecque. La Suisse a vendu un peu son âme, dira-t-on.

Vous pouvez emprunter n’importe quel pont pour vous rendre au centre-ville de l’autre côté de la rivière.

Il y a parfois un peu moins de monde quand il pleut. Mais pas sûr ! Les joailliers, les horlogers, les marchands de chocolat et de pacotille sont ouverts, quel que soit le temps.
Alors, tous ces gens, touristes européens, asiatiques ou d’ailleurs dans le monde, défilent dans les rues pavées et les places de la vieille ville, à la recherche de la meilleure affaire… ou simplement pour photographier les belles maisons peintes de la ville.
Lucerne est une ville où se mêlent histoire, culture et commerce, attirant des visiteurs du monde entier pour son charme pittoresque et son ambiance animée.
Alors, tous ces gens, touristes européens, asiatiques ou d’ailleurs dans le monde, défilent dans les rues pavées et les places de la vieille ville, à la recherche de la meilleure affaire… ou simplement pour photographier les belles maisons peintes de la ville.

Se promener dans le cœur de la ville permet de prendre la mesure du tourisme envahissant la ville. La Place du Cygne (Schwanenplatz) prend des airs de Chinatown ou de Hong Kong, les gratte-ciels en moins. L’ambiance y est frénétique. Des cars de tours organisés déposent un peu plus haut, près de Panorama Bourbaki, des milliers de visiteurs asiatiques, hier en majorité chinois, aujourd’hui souvent coréens et indiens aussi. Les employés des enseignes horlogères, où l’on vend montres, couteaux et bijoux, se sont grandement mis au mandarin. Dans les boutiques de luxe, les vendeurs parlant chinois sont souvent largement majoritaires. Même chez les pharmaciens ou les marins de bateaux de croisière, on commence à mâchonner du mandarin. Il faut dire que pour les voyageurs asiatiques, le temps passé à Lucerne est souvent chronométré. L’occupation majeure est le choix de la montre ou du couteau, plus que la visite des musées, des églises, des échoppes d’habits ou de chaussures. Il ne reste que peu de temps pour la balade. Alors, ils font la queue devant les bateaux de croisière pour de petits circuits d’une heure, qui leur permettront d’immortaliser sur la pellicule le Rigi ou le Pilatus.

Sur dix montres vendues en Suisse, quatre le sont à Lucerne. Les autres grands marchés sont Interlaken, Zurich ou Genève. Ce sont surtout les asiatiques, les chinois en particulier, qui sont friands de la marchandise. Les estimations de dépenses par jour vont de 400 CHF à 2’000 CHF en produits horlogers, moins taxés ici qu’en Asie. La Schwanenplatz est No3 au palmarès des lieux où se vendent le plus de montres au monde, derrière la Place Vendôme à Paris et le Plazza 66 à Shanghai. Aucune étude ne permet de dire précisément la quantité d’argent dépensée par les chinois en Europe ou à Lucerne. Il n’y a pas que des gens très riches ici, mais on avance que certains budgets avoisinent les 30 000 francs, rien que pour le shopping. Alors, il vaut mieux coucher presque à la belle étoile, pour consacrer plus d’argent aux bonnes affaires. Car, si les chinois dépensent leur argent en montres, ils ne logent pas tous dans les palaces, se contentant souvent de loger dans des hôtels nettement moins prestigieux, à des prix bradés par les tours organisateurs. Il n’est que de passer à l’heure de la fermeture des boutiques, pour voir les cohortes d’asiatiques regagner leur car et s’en aller on ne sait où.

Mais qui s’arrête vraiment, à part les asiatiques à Schwanenplatz, la Place du Cygne ? Toutes les boutiques de montres ne sont pas ici. Il y a sans doute une centaine de boutiques à Lucerne qui mesurent le temps qui passe. Mais les marques les plus célèbres sont toutes là, à partir de 500-1’000 CHF jusqu’à des prix jamais affichés en boutique. Nous ne saurions résister à vous montrer une image tirée d’Internet, où des soldes forcées, peut-être pour liquider les stocks, étaient organisées sur la place. 

Si vous êtes déjà servi en montres, alors il vous reste un autre totem du tourisme helvétique : le couteau suisse multifonctionnel, où on greffera peut-être un jour aussi le téléphone portable. Victorinox en est le leader, quasi un monopole. L’usine est juste à deux pas, entre Schwyz et Brunnen, à l’autre bout du lac. 

On allait oublier le chocolat. Tout de même ! Alors les touristes remplissent leurs sacs de chocolat ou de läckerli, originaires de Bâle, proches du pain d’épices, avec du miel, des fruits confits et des amandes. D’autres leur préféreront des copies de Luxemburgerli, des macarons, croquants à l’extérieur, fourrés à la crème. À l‘origine, ces petits fours sont l’exclusivité du confiseur Sprüngli, créés par un pâtissier helvético-luxembourgeois, à Zürich, dans les années cinquante. La recette est secrète et les petits fours sont disponibles en huit parfums, du moka à l’amaretto ou au kirsch. Ici, à Lucerne, ce ne sont que des copies.

Ici, il y a encore quelques montres à acheter.
Il reste encore un must de la visite de la ville : le lion de Lucerne. En montant vers le lion de Lucerne, vous passerez devant le Panorama Bourbaki, une grande rotonde de plus de 40 mètres de diamètre, couverte de peintures, dédiée à montrer la misère des soldats blessés, affamés et transis de froid qui ont passé la frontière suisse en 1871. L’armée française battue, conduite par Bourbaki, fut recueillie en Suisse par la Croix-Rouge et les autorités helvétiques. Cette œuvre humanitaire fut créée en 1881 par Edouard Castre, un volontaire de la Croix Rouge pendant la guerre.


C’est souvent noir de monde par ici, pour un lion qui s’ennuie sur son rocher. Alors, les touristes sirotent un verre à la terrasse et le train touristique en débarque d’autres.

Juste au-dessus du Panorama Bourbaki, Le Lion de Lucerne (Löwendenkmal), mortellement blessé, ne rugit pas mais attire plus d’un million de personnes chaque année. Le monument, érigé en 1821, commémore le massacre des mercenaires suisses tombés au service du roi de France en 1792, au palais des Tuileries à Paris, lors de la Révolution française. Le monument porte une dédicace : Helvetiorum Fidei ac Virtuti (À la loyauté et à la bravoure des Suisses). 
Nous arrivons au bout de la visite, et pour boucler la boucle, nous revenons vers la gare.

Chemin faisant, l’église Saint-Léger (Leodegar im Hof), est l’église la plus importante du canton catholique de Lucerne. Ici, il y avait au VIIe siècle une église consacrée à St Maurice, un don de Pépin le Bref. Devenue bénédictine, l’abbaye fut alors consacrée alors à St Légier, le saint patron de la ville. L’église fut détruite par un incendie et reconstruite à la fin du XIXe siècle.

Retournons au bord du lac. Les touristes attendent les bateaux de croisière sous la pluie ou sous le soleil. Sous la pluie, les touristes ne verront ni le Rigi, ni le Pilatus. Il faut bien se résigner. C’est l’attraction de voyage la plus courue ici à Lucerne. Les bateaux et les cars les y conduisent, pour s’embarquer plus loin dans les trains à crémaillère, qui montent de manière vertigineuse au sommet des deux montagnes qui se penchent sur Lucerne, une de chaque côté. Mais, les canards et les cygnes, eux n’ont que faire des intempéries. Ils quémandent, comme à leur habitude.
N’hésitez pas à ajouter des commentaires. C’est souvent ainsi que l’on monte dans la hiérarchie de Google, et que de plus nombreux pèlerins auront accès au site.
Etape suivante : Etape 10a: De Lucerne à Werthenstein par la Via Jacobi 3
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