Montagnes russes au-dessus du Lac de 4 Cantons
Lorsqu’on plonge dans les abîmes du temps, revenant au cœur du Moyen-Âge, la Suisse se révèle comme une terre de pèlerinage, vibrante d’une foi inébranlable. Les Germains, traversant des contrées lointaines, convergeaient vers les rives paisibles du lac de Zürich. Einsiedeln, avec son aura mystique, s’imposait comme le joyau de cette quête spirituelle, suivi de près par Payerne et Fribourg. La navigation sur le lac, orchestrée par des bateliers dévoués, guidait les âmes pèlerines vers Pfäffikon, porte d’entrée vers le sanctuaire d’Einsiedeln, niché dans l’écrin de Schwyz. Toutefois, l’aube de la Réforme ébranla ce flot incessant de dévotion, imposant un silence austère sur les chemins de pèlerinage. Naviguer entre les gouttes de cette tempête doctrinale devint l’épreuve ultime du pèlerin. Pour saisir l’ampleur de ce rassemblement de foi à Einsiedeln, imaginez une marée humaine de plus de 100’000 âmes lors de la Fête de la Consécration angélique en 1603. Quel contraste avec notre ère ! Le premier pont à enjamber le lac de Rapperswil, une construction audacieuse du duc Rodolphe IV en 1360, portait en lui les germes du péril, devenant le théâtre de tragédies inoubliables.
Depuis Brunnen, la Via Jacobi 4, sentier suisse traditionnel du Chemin de Compostelle, se dessine à travers la majestueuse toile des paysages suisses, longeant le nord serein du Lac des Quatre Cantons vers des horizons empreints d’histoires, Stans, puis Sarnen, franchissant le col du Brünig pour se fondre dans la quiétude d’Interlaken. Mais la Suisse, écrin de nature, est traversée par une myriade de chemins, chacun racontant sa propre légende, qu’ils soient de portée nationale ou des tracés plus intimistes. En ce qui concerne la Via Jacobi 4, un autre itinéraire part de Lucerne. C’est curieux, la Via Jacobi 4, non ? Car le Chemin de Compostelle n’est pas connecté par la Via Jacobi jusqu’à Lucerne. Qu’à cela ne tienne ! Il suffit de suivre depuis Brunnen, un itinéraire régional, Le Chemin Waldstätterweg, qui porte le numéro de Via Jacobi 98. Ce détournement, loin d’être un obstacle, devient une belle échappée, caressant les rives sud du lac jusqu’à embrasser Lucerne. De là, une variante de la Via Jacobi 4 tisse son chemin vers Berne, réunifiant les âmes voyageuses avec la route ancestrale peu avant Fribourg.
Le chemin Waldstätterweg, c’est l’exploration d’un monde à part, une immersion dans la carte postale vivante du Lac des Quatre Cantons (Vierwaldstättersee), bijou de la Suisse centrale. Comme une épopée circulaire, l’itinéraire épouse les contours du lac, étreignant chacun de ses bras dans une étreinte panoramique. Ce périple, inauguré en 1991 et redécouvert tel un trésor oublié, vous invite à Lucerne, à la découverte de ce chemin, maintenant jalonné et bercé par la majesté de paysages où les montagnes s’enivrent de leur reflet dans le lac, et où les embarcations dansent dans le labyrinthe aquatique. En trois jours, défiant des distances qui n’excèdent jamais 18 km par jour, Lucerne se dévoile. La première escale, Vitznau, se dresse fièrement au bord du lac, mais gardez à l’esprit : le chemin n’est point une simple promenade. Il s’élève, se courbe et plonge, épousant les flancs de la montagne du Rigi, rendez-vous des âmes errantes, des touristes en quête de merveilles.
Nous avons divisé l’itinéraire en plusieurs sections, pour faciliter la visibilité. Pour chaque tronçon, les cartes donnent l’itinéraire, les pentes trouvées sur l’itinéraire et l’état du parcours (routes ou chemins). Les itinéraires ont été conçus sur la plateforme “Wikilocs”. Aujourd’hui, il n’est plus nécessaire d’avoir des cartes détaillées dans votre poche ou votre sac. Si vous avez un téléphone mobile ou une tablette, vous pouvez facilement suivre l’itinéraire en direct.
Pour ce chemin, voici le lien :
Difficulté du parcours : Quant au défi que représente cette traversée, les chiffres parlent d’eux-mêmes : un dénivelé de +601 mètres suivi d’une descente de -600 mètres pour une modestie de 15 kilomètres. Après une échappée plate depuis Brunnen, une première ascension annonce la couleur, plongeant ensuite vers Gersau, à l’étreinte du lac. La seconde montée, bien que moins impétueuse, sculpte également le flanc montagneux avant de se rendre à nouveau au lac. C’est un parcours d’une beauté à couper le souffle, certes, mais qui exige son tribut en sueur et en persévérance.
État de la Via Jacobi : Dans cette étape, les parcours sur route ou sur sentiers sont équivalents :
- Goudron : 7. 9 km
- Chemins : 6.1 km
Ce n’est évidemment pas le cas pour tous les pèlerins d’être à l’aise avec la lecture des GPS et des cheminements sur un portable, et il y a encore de nombreux endroits sans connexion Internet. De ce fait, vous trouverez sur Amazon un livre qui traite de ce parcours.
Si vous ne voulez que consulter les logements de l’étape, allez directement au bas de la page.
Parfois, pour des raisons de logistique ou de possibilités de logement, ces étapes mélangent des parcours opérés des jours différents, ayant passé plusieurs fois sur sur ces parcours. Dès lors, les ciels, la pluie, ou les saisons peuvent varier. Mais, généralement ce n’est pas le cas, et en fait cela ne change rien à la description du parcours.
Il est très difficile de spécifier avec certitude les pentes des itinéraires, quel que soit le système que vous utilisez.
Pour les “vrais dénivelés ”et pour les passionnés de véritables défis altimétriques, consultez attentivement les informations sur le kilométrage au début du guide.
Section 1 : Une balade au bord du lac avant une petite bosse, juste pour se chauffer
Aperçu général des difficultés du parcours : à plat, puis une bosse sévère à la fin du tronçon.
L’étape débute au port de Brunnen, où se déploie un panorama saisissant sur le Lac des Quatre Cantons. Suivre la Via Jacobi 4 requiert une traversée en bateau jusqu’à Treib, sur la rive opposée, tandis que la Via Jacobi 98 prend son envol depuis le port, sur la rive méridionale du lac.
Elle serpente à proximité du parc de la Place des Suisses de l’Étranger, franchit le Leewasser, une étendue d’eau s’écoulant du lac, avant de longer une marina pittoresque. Là, les voiliers dorment au rythme des flots, leurs mâts se découpant gracieusement contre le ciel azuré.
Puis, la route s’éloigne des rives pour arpenter l’une des banlieues de Brunnen, certes moins enchanteresse, à l’instar de ces faubourgs qui souvent peinent à rivaliser avec la splendeur des centres urbains. Les maisons se succèdent, ponctuées çà et là de jardins verdoyants où s’épanouissent les fleurs aux couleurs vives, offrant un contraste apaisant avec l’agitation citadine.
La route se déploie alors à travers une vaste plaine, une piste d’atterrissage idéale pour les parapentistes qui foisonnent en ces lieux, comme autant de papillons célestes venus égayer l’horizon. Les montagnes majestueuses se dressent en toile de fond, faisant de cette traversée une véritable ode à la nature.
Le fléchage de la Via Jacobi 98 verra souvent l’inscription Waldsätterweg. Vous y verrez aussi écrit Via Jacobi 98, aux principaux carrefours.
À la sortie de la banlieue, la Via Jacobi 98 trouve la route du lac et traverse la Muota, une rivière assez importante que nous avons rencontrée plus tôt, à Ibach, entre Schwyz et Brunnen. L’eau cristalline murmure doucement tandis que le pont, solide et rassurant, est le témoin silencieux du flux discret d’automobilistes sur cet axe.
La Via Jacobi suit alors la route du lac. Brunnen se prolonge ici au bord du lac, dans un quartier de maisons assez récentes. Les façades se penchent sous les frondaisons de la montagne qui se penche sur le lac, offrant une image de quiétude et de modernité.
De l’autre côté du lac se dressent les impressionnantes falaises du Seelisberg, où passe la Via Jacobi 4, le Chemin de Compostelle de référence en Suisse. Leur majesté défie le ciel, semblant veiller sur les pèlerins et les marcheurs telles des sentinelles immuables, témoins muets des siècles qui s’écoulent.
Le parcours suit la route jusqu’à la marina de Fallenbach. Là, les voiliers s’alignent en une parade nautique, leurs voiles rarement gonflées par le vent, rarement prêts à défier les flots et à partir à l’assaut du lac.
Près de la marina de Fallenbach, la Via Jacobi abandonne la route du lac pour grimper vers la forêt. Là, la nature se referme doucement autour du marcheur, l’enveloppant de sa quiétude bienveillante, tandis que les sentiers s’ouvrent à lui comme une épreuve.
Que du plaisir, à plus de 40% de pente, par de petits escaliers plantés entre cailloux et herbe. Chaque pas est une victoire sur la gravité, chaque souffle une symphonie de vie dans ce ballet harmonieux entre l’homme qui souffre et la nature.
Brunnen disparaît peu à peu au bout du lac dans un spectacle ébouriffant. Les montagnes se dressent en arrière-plan, leurs cimes enneigées se mêlant aux nuages, tandis que le lac scintille tel un miroir, reflétant la majesté de ce paysage grandiose.
La rude montée n’est pas trop longue et le chemin traverse un sous-bois de chênes, de hêtres, de châtaigniers et de charmille, au-dessus du lac. Les arbres racontent de vielles histoires, témoins immuables de la beauté brute et sauvage de la nature.
Le sentier court un peu au bord d’une gorge, puis redescend sur des escaliers dessinés sur la terre pour traverser le ruisseau du Fallenbach. Là, l’eau chante sa mélodie cristalline, taillant son chemin à travers les rochers avec une détermination tranquille, tandis que les escaliers, témoins silencieux du passage des marcheurs, semblent fusionner avec le paysage dans une harmonie parfaite.
Ici, au cours des millénaires, le ruisseau a lissé la falaise et l’eau ruisselle, dégringolant en cascade. De ce côté du lac, où culmine la montagne du Rigi, les pentes sont très escarpées. Il en va de même de l’autre côté du lac, sur les pentes du Seelisberg. En fait, le lac, dans une grande partie, est comme un entonnoir où les montagnes plongent de toute leur hauteur dans l’eau, souvent turquoise. Cette géographie spectaculaire, sculptée par le temps et les éléments, offre un spectacle à couper le souffle, une ode à la puissance et à la beauté de la nature.
Peu après, le chemin emprunte en descente légère une splendide passerelle de fer accrochée à la falaise surplombant la route. Dans ces forêts, la végétation est parfois très mixte, parfois presque méditerranéenne avec la présence de pins. Le voyageur se laisse envelopper par cette atmosphère surréaliste, tandis que la passerelle, telle une ligne de vie suspendue entre ciel et terre, invite à l’évasion et à la contemplation.
Au bout de la passerelle, le chemin reste encore un peu en forêt, avant de regagner la route du lac au lieu-dit Brünischart. Il faut bien se rendre compte qu’à cause de la rigueur des contreforts de la montagne, il a fallu trouver des passages pour laisser passer les promeneurs, qui ne sont pas tous des alpinistes chevronnés. Chaque sentier est un équilibre subtil entre la préservation de la nature sauvage et l’accessibilité pour tous, offrant ainsi aux voyageurs une expérience enrichissante et sécurisée au cœur de ces paysages grandioses.
Ici la Via Jacobi ne fait que passer par la route, pour remonter aussitôt sur la colline. Les contours sinueux de la route du lac mènent le marcheur à travers une danse envoûtante entre ombre et lumière, offrant des panoramas changeants sur les eaux scintillantes du lac et les montagnes majestueuses qui se dressent à l’horizon.
Sur cette petite butte, la montée n’est pas longue, et le chemin ondule au-dessus du lac. Il traverse un ruisseau sans nom. Dans ces régions de lacs alpins se perpétuent en nombre de petits canyons, le plus souvent sans eau, sauf en cas de gros temps. Chaque pas résonne comme une invitation à l’exploration, à la découverte de ces terres sauvages où la nature dévoile ses mystères au fil des saisons.
Rapidement, la Via Jacobi gagne une bifurcation à l’entrée de la forêt. Ici les courageux montent en plus de 3 heures sur les hauteurs du Rigi. Des dizaines de chemins, partant de toute la ceinture du lac, amènent les nombreux randonneurs là-haut, à 1’800 mètres d’altitude. Les Chinois et les autres touristes, eux, empruntent des moyens de communication, que l’on dira moins exigeants, le train ou le téléphérique. Chaque sentier est une invitation à l’aventure, à la découverte de panoramas époustouflants et de moments d’émerveillement face à la splendeur de la nature.
Section 2 : Dans les bois, bien au-dessus du lac
Aperçu général des difficultés du parcours : pentes souvent extrêmes.
Cependant, il n’y a pas que la montée au Rigi qui soit raide. Sur la Via Jacobi, la montée sera aussi difficile, et c’est peu dire. C’est plus de 200 mètres de dénivelé sur un peu plus de 1 kilomètre, avec parfois des pentes jusqu’à 35-45%. Pourtant, ici au départ, cela ne paraît pas insurmontable. Chaque pas devient un défi, une lutte contre la gravité elle-même, tandis que le chemin se dévoile tel un serpent sinueux à gravir, offrant aux marcheurs une leçon d’humilité face à la grandeur de la nature.
Peu après, voici une pente plus raide, alors des escaliers aident avec bonheur le marcheur. Chaque marche franchie est une victoire sur l’adversité, un pas de plus vers le sommet.
Le chemin progresse parfois sur de grosses racines, parfois sur de la terre caillouteuse, protégé par des barrières. Toutefois, ce n’est pas un parcours délicat pour les gens sujets au vertige. Chaque instant est une rencontre avec l’essence même de la montagne, où la rudesse des éléments se mêle à la beauté brute et sauvage de ces terres vierges.
Parfois, de rares percées permettent de voir le lac, bien en dessous. Magnifique, bien évidemment, cet horizon immense que l’on admire, parce qu’il est superbe. Surtout par beau temps, évidemment. Chaque regard porté sur les eaux scintillantes du lac est une invitation à la contemplation, à l’émerveillement devant la splendeur infinie de la nature, une étreinte entre le ciel et l’eau qui transporte l’âme vers des horizons insoupçonnés.
À mi-montée, la pente se calme un peu et un petit oratoire au bord du chemin permet de reprendre son souffle, ou de faire une petite prière. C’est selon…. Au sein de cet humble sanctuaire, les pèlerins trouvent un réconfort spirituel, une pause bienvenue dans l’ascension vertigineuse vers les hauteurs. Le silence paisible de cet endroit sacré invite à la contemplation, à la méditation, offrant aux âmes en quête de répit un havre de paix au cœur de l’effort.
Car la montée est loin d’être achevée, peu s’en faut. De petits escaliers aident à nouveau le marcheur, sur un chemin où affleurent les rochers. Chaque pas est une victoire sur l’adversité, chaque escalier franchi un nouveau cap dans cette quête incessante vers les sommets. Les rochers qui émergent du sol sont autant de témoins muets de la rudesse du terrain, de la force inébranlable de la montagne qui se dresse devant les courageux marcheurs.
Retournez-vous, et vous constaterez la difficulté de l’exercice. Le panorama qui s’offre à la vue est à couper le souffle, une toile grandiose où se mêlent les nuances changeantes du ciel, les sommets majestueux des montagnes et les eaux scintillantes du lac, témoins immuables de la grandeur de la nature.
Plus haut, un rare banc bienvenu permet de se reposer quelques instants, dans l’ombre bienfaisante des arbres. Le banc, témoin silencieux des péripéties des marcheurs, offre un point d’observation privilégié sur les splendeurs qui s’étendent à perte de vue. De l’autre côté du lac se profile la Via Jacobi 4 sous les falaises du Seelisberg. Dans cette nature aride, le panorama est à couper le souffle. Les falaises abruptes se dressent telles des remparts immuables, défiant le ciel lui-même, offrant aux courageux aventuriers un spectacle grandiose, une invitation à la contemplation de la beauté brute et sauvage de ces terres.
Dans les dernières centaines de mètres, la pente ne se calme guère, à près de 25% sur le sentier rocailleux. Chaque pas est une lutte contre l’inclinaison implacable du terrain, chaque avancée un défi lancé à la montagne elle-même, sur ce sentier rocailleux, témoin de la rudesse du lieu.
Au sommet de la montée, sous les pins et les feuillus, en se retournant, vous apercevrez encore Brunnen, au bout du lac. Vous êtes ici à 50 minutes de marche de Gersau. Chaque pas accompli a été une victoire sur l’adversité, chaque regard porté en arrière une invitation à la gratitude, à la contemplation de l’effort accompli et des merveilles qui vous entourent.
La descente sera assez longue, avec près de 2 kilomètres pour rejoindre le lac. Contrairement à la montée, la descente au début est plus douce au départ, mais tout de même à près de 20% de pente, sur l’étroit sentier qui zigzague. Chaque pas est une maîtrise constante de la gravité qui attire inexorablement les marcheurs vers les profondeurs du paysage.
C’est un étroit sentier peu caillouteux qui se faufile sur le flanc de la montagne, au milieu des pins, des chênes et des hêtres. On voit aussi de rares tilleuls ou des châtaigniers. La diversité de la flore qui borde le sentier est une véritable invitation à l’exploration, offrant aux marcheurs une palette de couleurs et de senteurs changeantes au fil de leur descente.
Comme l’indique le panneau, vous marchez dans une “forêt sèche”, un type de forêt arborée dense ou semi-dense, qui alterne de brefs climats pluvieux saisonniers avec des climats secs plus longs. Elle est l’opposée “d’une forêt humide”. Chaque pas dans cette forêt évoque une communion avec la nature, une immersion dans un écosystème complexe et fascinant au milieu des arbres.
Le petit sentier forestier rejoint assez rapidement un large chemin de terre battue. Dès que l’on quitte la clairière, les feuillus prennent nettement le dessus. L’épaisse canopée des arbres projette une ombre bienvenue sur le sentier, offrant aux marcheurs un refuge ombragé. Chaque pas crisse et résonne sur le sol caillouteux.
La route de terre battue descend en pente régulière, entre 10 et 15% de pente. Plus bas, elle rejoint plus loin une petite route goudronnée. Chaque virage dévoile un nouveau panorama, une nouvelle perspective sur les vallées verdoyantes où parfois on entrevoit les sommets majestueux qui se profilent à l’horizon.
La route descend jusqu’à rejoindre les premières maisons de Rüteli. Chaque maison semble émerger de l’écrin de verdure, telle une perle précieuse nichée au creux de la montagne.
La route continue à descendre. On pourrait suivre la route jusqu’au lac, mais la Via Jacobi a un autre programme pour vous. Elle n’aime pas les routes, même si aucune voiture n’y passe, ou si rarement. Alors, un petit tour au-dessus de Gersau, pour le plaisir de vous faire admirer le village d’en haut. Le parcours quitte donc la Rütelistrasse pour un chemin qui remonte sur une butte. Chaque pas sur ce chemin alternatif est une invitation à la découverte, à l’exploration de nouvelles perspectives sur le village qui se déploie en contrebas, offrant aux marcheurs un regard privilégié sur la beauté intemporelle de ces terres baignées par le lac.
À partir d’ici s’annonce un gymkhana incroyable pour rejoindre Gersau. C’est d’abord un sentier escarpé et glissant. Chaque virage est une épreuve de dextérité, une danse délicate entre la roche et la terre, où chaque pas demande une concentration intense et une maîtrise parfaite de l’équilibre.
Le sentier passe devant un petit oratoire. Vous marchez dans le canton de Schwyz, un canton catholique. L’oratoire, humble témoignage de la foi qui guide les pas des marcheurs, offre un moment de recueillement au cœur de l’effort, un instant de connexion avec le divin dans ce paysage sauvage et majestueux. .
Le sentier débouche sur une petite route en dessous qui arrive à Büel, une banlieue assez cossue de Gersau. Chaque maison qui borde la route témoigne de la vie paisible et prospère qui règne dans ce coin de paradis alpin.
La route traverse un peu le village cossu en pente. La route invite à la flânerie, offrant aux marcheurs une immersion totale dans l’atmosphère pittoresque et authentique de Gersau, où chaque coin de rue révèle un nouveau trésor caché.
Mais la route est un cul-de-sac. Alors, la Via Jacobi s’en va sur un petit chemin au-dessus du bourg de Gersau. Certaines maisons plongent sur le lac. D’autres cultivent le nain, un objet de convoitise apprécié dans la région.
Vous êtes juste au-dessus de Gersau (2’400 habitants), dans le canton de Schwyz, avec son église dédiée à St Marcel, une église baroque du début du XIXème siècle. L’église, majestueuse et imposante, domine le paysage, offrant aux voyageurs un repère symbolique dans cet environnement enchanteur.
Le chemin débouche alors au bord du lac. En face, vous apercevez l’autoroute qui passe en tunnel vers Beckenried sur le passage de la Via Jacobi 4, le Chemin de Compostelle traditionnel suisse. Le lac s’étend à perte de vue, calme et majestueux, offrant aux voyageurs une pause bienvenue après leur périple à travers les montagnes.
Près du port, la berge est charmante et la route du lac est bordée d’hôtels et de restaurants qui se suivent. Dans toute cette région du lac, un tourisme, que l’on dira de qualité supérieure, s’est développé au cours des années. Chaque établissement qui borde la route du lac est une invitation à la détente et au raffinement, offrant aux voyageurs un accueil chaleureux et des prestations de haut standing dans un cadre enchanteur.
Les bateaux sillonnent le lac, qu’ils soient de la ligne régulière ou d’excursion privée. De nombreux touristes, suisses et étrangers, font ainsi des sauts de puce d’une rive à l’autre. La navigation sur le lac est une expérience inoubliable, une manière unique de découvrir les charmes secrets de cette région préservée, au fil de l’eau et des souvenirs qui se créent.
La Via Jacobi quitte alors la route du lac pour monter dans le bourg en suivant la rivière intérieure du Dorfbach (Innere Dorfbach). La route serpente à travers le village, offrant aux marcheurs une immersion authentique dans la vie quotidienne des habitants, où le murmure apaisant de la rivière accompagne leurs pas.
Les hôtels et les auberges ne manquent pas dans le village, même sur les hauteurs, et on voit souvent des maisons typiquement schwyzoises recouvertes de bardeaux. Chaque établissement est une oasis de confort et de convivialité, où l’art de vivre à la suisse se conjugue avec l’hospitalité légendaire des habitants, offrant aux voyageurs un séjour mémorable au cœur des Alpes.
Section 3 : Encore une belle bosse au-dessus du lac
Aperçu général des difficultés du parcours : pentes souvent extrêmes.
Au sommet du bourg, la Via Jacobi 98 traverse le Dorfbach. On annonce Witznau à 2h15 d’ici. L’horloge du temps semble suspendue dans l’air paisible du village, offrant aux voyageurs un moment de contemplation et de réflexion avant de poursuivre l’ascension.
La route sort des hauts du bourg, traverse la rivière extérieure du Dorfbach (Usser Dorfbach/Sagenbach). Le murmure apaisant de la rivière accompagne les pas des marcheurs, les guidant vers les hauteurs.
La pente va devenir très rude sur un petit tronçon. Chaque pas est un défi, une lutte contre l’inclinaison implacable du terrain, où se mêlent la fatigue et la détermination des marcheurs.
En se tournant, Gersau disparaît progressivement de la vue. Dans un tel décor de carte postale, n’y passerait-on pas quelques jours, non ? En face se dressent, terribles les falaises du Seeligsberg, où passe l’autoroute du Gothard en tunnel. Vous comprenez aussi que, quel que soit le parcours que vous emprunterez, de l’autre côté sur la Via Jacobi 4, il faudra aussi s’armer de courage pour passer au-dessus des falaises. Chaque panorama qui se dévoile est une invitation à l’émerveillement, à la contemplation de la grandeur de la nature et de la petitesse de l’homme face à l’immensité du monde qui l’entoure.
Plus haut, la route quitte les dernières maisons pour gagner les prés en pente. L’atmosphère se transforme peu à peu, passant de l’agitation paisible du village à la quiétude pastorale des prairies alpines, à nouveau vers la nature sauvage.
La route pénètre alors en forêt, franchit un petit tunnel. Le passage à travers le tunnel est comme une transition entre deux mondes, entre la clarté du jour et l’obscurité mystérieuse de la forêt, offrant aux marcheurs une pause fugace avant de poursuivre leur chemin à travers les sentiers ombragés. .
Vous avez pris presque 150 mètres de dénivelé depuis le lac. A la sortie du tunnel, il faut être attentif à la direction. La route continue sur Ober Rängg. Celle-là, c’est la route des sportifs qui vont au Rigi. La Via Jacobi 98, la vôtre, s’engage en dessous de la route, direction Unter Rängg.
C’est un étroit sentier, comme on en rencontre dans les Alpes, qui hésite en forte pente entre les sous-bois et les prés. Chaque pas est une délicate danse entre la terre ferme et les racines qui émergent du sol, offrant aux marcheurs une expérience parfois douloureuse au cœur de la nature sauvage.
Il transite devant un cabanon qui doit peut-être servir de refuge aux moutons. L’ancienne masure, témoin silencieux de la vie pastorale qui anime ces terres depuis des siècles, semble veiller sur les voyageurs de passage, offrant un abri précaire dans ce paysage majestueux et impitoyable.
Parfois, la pente se fait encore un peu plus rude. Alors les escaliers viennent à la recousse, coincés contre le rocher. Chaque marche est un défi à gravir, une ascension vers de nouveaux sommets, offrant aux marcheurs une opportunité de tester leur endurance et leur détermination dans ce paysage accidenté et sauvage.
Le chemin franchit plusieurs portails pour contenir les moutons ou les vaches qui pâturent sur ces rudes pentes. Plus haut, vous pouvez rejoindre le chemin qui va vers Ober Rengg, mais vous suivrez sagement le chemin de Unter Rengg. C’est déjà assez haut.
Peu après, sur la pente abrupte, le chemin passe des prés vers un bosquet où devrait couler un ruisseau sans nom, un canyon discret, en quelque sorte. Chaque pas résonne dans le silence de la nature, révélant aux marcheurs l’immensité et la beauté brute de ces terres sauvages, où chaque détour réserve une nouvelle surprise à découvrir.
Vu l’état des lieux et la pente impitoyable, on imagine sans peine qu’il vaut mieux avoir des moutons par ici que des vaches. Chaque animal qui pâture sur ces pentes escarpées doit faire preuve d’une agilité et d’une résilience exceptionnelles pour survivre dans ce paysage inhospitalier, où seuls les plus adaptés peuvent prospérer.
Quand on veut ménager un peu son effort, on peut s’attarder à admirer ce lac incroyable, bien en dessous de vous derrière les herbes et les fleurs sauvages. Chaque instant passé à contempler la splendeur du lac est un voyage dans le temps, où la beauté de la nature se dévoile dans toute sa grandeur et sa majesté.
Le chemin monte encore un peu, avec quelques barrières de contention pour le bétail, chaque barrière franchie étant une étape de plus vers le sommet…
… avant de gagner Unter Rängg, à 650 mètres d’altitude. Unter Rângg, c’est une vieille maison de bois avec des ruches, sans doute habitée, comme un point de repère dans le paysage, dans cette terre sauvage et sans doute assez inhospitalière.
Une route avec impasse passe au-dessus vers Ober Rängg, mais notre parcours n’y va pas. Il va redescendre de la montagne, à environ 1 heure 20 de Vitznau.
De Unter Rängg, un chemin assez large part en légère descente dans l’herbe vers un sous-bois…
… avant de plonger avec délice dans le sous-bois. Chaque pas dans le sous-bois est une immersion dans un monde mystérieux et enchanteur, sur le tapis de feuilles mortes, à l’ombre des pins et des hêtres majestueux.
Il remonte même légèrement sous une barrière rocheuse. La nature est très torturée dans la région. Chaque pli de la terre raconte une histoire ancienne, marquée par les caprices du temps et les forces géologiques titanesques qui ont sculpté ce paysage majestueux. Le Lac des 4 Cantons, avec ses parois de 500 mètres qui tombent dans le lac, s’est formé lors du retrait du glacier de la Reuss à la fin de la dernière période glaciaire, il y a 12’000 ans. Toute la région, c’est avant tout de la molasse et des conglomérats ou de poudingues, que les alémaniques baptisent du nom de Nagelfluh. Voici l’origine de ces roches. Au cours des longs plissements alpins de l’ère tertiaire, les parties émergées des Alpes ont été promptement soumises à l’action de l’érosion. Des masses plus ou moins abondantes de roches alpines furent entraînées et se sont accumulées, entremêlées de molasse, dans un grand lac, plus tard la mer, qui recouvrait le Plateau suisse. Serrés, pressés, ces matériaux se sont agglomérés, formant précisément les poudingues. La poussée alpine continuant, ils se sont plissés à leur tour. Ainsi se sont édifiées les montagnes molassiques des Préalpes, dont le Rigi sur le flanc duquel passe la Via Jacobi 98. Pourtant, ces matériaux n’appartiennent pas aux Alpes, même s’ils ont été arrachés des Alpes. Ils ont été entraînés dans les eaux baignant le pied nord des Alpes et mélangées en même temps aux roches molassiques voisines. Dans les Alpes suisses, il n’y a guère de molasse. Toute cette région du Rigi est uniquement composée de molasses et de conglomérats. Elle appartient donc nettement au Plateau et aux Préalpes.
Puis le sentier continue de descendre dans les prés. Chaque pas dans l’herbe douce est une descente vers l’inconnu, offrant aux marcheurs une sensation d’excitation mêlée de contemplation devant la beauté sauvage de la nature qui les entoure.
Bientôt, vous apercevrez devant vous le défilé étroit de Vitznau, un haut lieu de la défense militaire suisse durant la dernière guerre mondiale, avec le promontoire boisé du Unter Nas au-devant, et en arrière-plan, le Bürgenstock. Le premier promontoire était l’Ober Nas, sur lequel la via Jacobi progresse. Secret militaire, chut ! Chaque contour de la terre révèle les cicatrices du passé, où la géographie tumultueuse de la région a été façonnée par les mains de l’homme et les exigences de la défense nationale.
Sincèrement, quel ennemi se serait-il permis de violer l’Unter Nas, un tel promontoire qui plonge dans les eaux calmes helvétiques ? Chaque promontoire rocheux est un bastion imprenable, une forteresse naturelle qui témoigne de la vigilance perpétuelle de la Suisse face aux menaces extérieures, offrant aux observateurs une vue imprenable sur les eaux paisibles du lac et les paysages grandioses qui les entourent.
Le chemin descend dans les prés sur la crête, au milieu des vaches tranquilles.
Assez rapidement, le chemin arrive au hameau de Abnet, où la Via Jacobi 98 retrouve le goudron. Chaque rencontre avec la civilisation est un rappel de la fugacité de l’aventure, offrant aux marcheurs une transition en douceur entre la nature sauvage et le monde civilisé qui les attend en bas.
La route entame alors une descente raide vers le lac, passe près de la petite auberge de montagne de Kuorez. Les Suisses sont très friands de ce type d’auberge sur les hauteurs. Chaque auberge dans ces panoramas semi-alpins est un havre de chaleur et de convivialité.
Section 4 : Descente sur le lac
Aperçu général des difficultés du parcours : pente soutenue jusqu’à rejoindre le lac.
La route descend plus loin sur Unter Linden, passe devant une belle demeure schwytsoise, témoignage de l’architecture locale, offrant aux voyageurs une vue sur la richesse culturelle et historique de la région.
La route fait des lacets. Bientôt, on aperçoit Weggis au loin, et en descendant encore, Witznau plus loin. Chaque virage de la route est une anticipation de la destination finale, offrant aux voyageurs une vue imprenable sur les paysages pittoresques qui s’étendent devant eux.
Un drapeau suisse est planté dans les falaises du Rigi. Vitznau possède une forteresse militaire. Les falaises et le défilé sont truffés de postes d’artillerie, autrefois le grand secret du “réduit suisse”. Tout cela a changé : on peut même dormir dans la forteresse ! Chaque élément de l’histoire militaire est un rappel des temps troublés du passé, offrant aux visiteurs une immersion dans les défenses stratégiques qui ont jalonné l’histoire de la Suisse, durant les deux dernières grandes guerres mondiales.
La route en lacets descend encore et toujours au milieu des moutons. C’est une descente dans l’humilité, offrant aux marcheurs une communion avec les éléments naturels qui peuplent les collines verdoyantes et les vallées tranquilles.
La Via Jacobi suit encore un peu la route avant de bifurquer sur un chemin qui descend vers l’hôtel Flora Alpina, qui fait face à l’Unter Nas.
A l’horizon, on voit Weggis et même plus loin vers Lucerne. Vitznau est juste en dessous. Cette vue panoramique est une invitation à l’émerveillement, offrant aux marcheurs une contemplation sans fin des beautés naturelles qui s’étendent devant eux.
Le FlorAlpina est un hôtel merveilleusement situé, en face du mamelon boisé de l’Unter Nas, au lieudit Bürglen. On y donne même parfois des concerts en plein air. La vue sur le lac, à la tombée du jour, est divine. Là-bas, de l’autre côté de Vitznau, c’est le “Park Hotel Vitznau” et ses cinq étoiles, sur un promontoire verdoyant dominant le lac. Aujourd’hui encore, c’est l’un des plus prestigieux établissements hôteliers de Suisse centrale, digne héritier d’une tradition d’excellence remontant aux origines du tourisme en Suisse, une oasis de luxe et de raffinement, offrant aux voyageurs une expérience inoubliable au cœur des Alpes suisses.
Depuis le FlorAlpina, il n’est que de suivre la route pour arriver à l’entrée de Vitznau, à deux pas. Chaque pas sur ce trottoir, dans un genre de canyon qui domine le lac, est un voyage entre les parois de rochers et les eaux tranquilles.
A l’entrée du bourg, on quitte la route pour un chemin sur les hauts du bourg. Mais rapidement le goudron devient prioritaire et la route transite le long des villas proprettes et du camping local, dans la périphérie du village non touristique.
Plus loin, la route passe le discret ruisseau de Altdorfbach, dans le vieux village rajeuni, qui se perd dans ses ruelles.
Vitznau, comme Greppen et Weggis, font partie de cette portion de territoire lucernois, enclavés dans le canton de Schwyz. Seules les eaux du lac les relient au reste du canton de Lucerne. Lucerne est un canton riche, Schwyz non. Vitznau (1’500 habitants) est situé dans une baie idyllique du lac des Quatre-Cantons au pied du Rigi. Cette station de villégiature est un point de départ très apprécié pour de nombreuses excursions autour du lac, et bien sûr avant tout vers le Rigi, la montagne emblématique de la Suisse centrale, où il y a plus de touristes que de bétail. Une demi-heure de train sépare Vitznau au bord du lac, à 435 mètres d’altitude, du sommet du Rigi à 1798 m. Jadis, les hôtes fortunés se faisaient transporter en chaises à porteurs. Avec l’ouverture du premier chemin de fer à crémaillère du monde en 1871, la manière la plus confortable d’atteindre le sommet du Rigi est de prendre le train à crémaillère Vitznau-Rigi, la première remontée mécanique d’Europe.
Logements sur la Via Jacobi
- Gasthaus Tübli, Dorfstrasse 12, Gersau; 041 828 12 34 ; Hôtel, repas, petit déj.
- Seehotel*** Riviera, Route du Kac 24, Gersau ; 041 828 19 19 ; Hôtel, repas, petit déj.
- Gasthaus Platten, Plattenweg1, Gersau ; 079 881 32 69 ; Hôtel, repas, petit déj.
- Hotel*** FlorAlpina, Schibernstrasse 2, Vitznau ; 041 399 70 70; Hôtel, repas, petit déj.
- Hotel*** Terrasse am See, Banhofstrasse 2, Vitznau ; 041 397 10 33 ; Hôtel, repas, petit déj.
- Hotel*** Rigi Vitznau, Seestrasse 65, Vitznau ; 041 399 85 85 ; Hôtel, repas, petit déj.
Cette région est hautement prisée des touristes, regorgeant de nombreux appartements de vacances et de locations Airbnb, dont les adresses restent toujours mystérieuses. Nous avons uniquement mentionné les hôtels de moyenne catégorie, qui affichent déjà des tarifs assez élevés. En Suisse, les hôtels de basse catégorie sont rares. Quelques établissements hôteliers de grand luxe parsèment également la région, mais ils sont peu fréquentés par les pèlerins. Sur le parcours, vous trouverez de rares établissements pour boire un verre ou manger quelque chose, si ce n’est à Gersau. Gersau et Vitznau disposent de tous les commerces. En haute saison, il est impératif de réserver à tout prix, car les hébergements sont très sollicités.